« Etre citoyen » n°33

Edito

Au moment où ce numéro est en train d’être finalisé, je suis surpris que cette valeur de citoyenneté n’occupe pas davantage de place dans l’espace médiatique de la campagne électorale en France. On parle me semble-t-il de beaucoup de choses mais peu de citoyenneté.

Peut-être connaissez-vous l’outil Google Trends ? C’est un volet du célèbre moteur de recherche qui permet de regarder, en évolution sur plusieurs années, l’intérêt pour un terme précis en fonction du nombre de fois où ce mot est recherché dans l’outil Google. Ce qui est frappant pour le terme citoyen c’est qu’il est quasiment deux fois moins recherché aujourd’hui qu’il y a dix ans. Et, je trouve également révélateur que les pics de recherche récents correspondent aux vagues d’attentats qui ont frappé la France… C’est ce qu’évoque Pierre Curtelin dans l’interview que vous pourrez lire dans ce numéro : une tendance lourde à l’individualisation de la société qui ne doit cependant pas occulter une permanence de certains engagements citoyens, notamment dans des moments dramatiques.

Cette individualisation de la société se double d’une crise de la représentation politique. Pour les maristes, cela renvoie à l’image déjà dégradée qu’avait Jean-Claude Colin de la politique partisane : « Nous ne sommes pas pour changer le gouvernement mais pour sauver les âmes » disait-il. C’est un des thèmes développés dans la rubrique Histoire et spiritualité de ce numéro. Une posture qui doit aujourd’hui se confronter à l’injonction du pape François : « La politique est la forme la plus haute de la charité, car elle cherche le bien commun. »

La question « Suis-je ou non citoyen ? » est donc, à mes yeux celle de la force de mon engagement malgré la difficulté à transformer un système qui résiste. Est-ce que j’accepte de m’exposer à nouveau à la brûlure de la déception avec un engagement fort dans le monde, alors que je fais parfois face à l’individualisation, l’injustice, la violence, l’indifférence ?

Être citoyen implique de se remettre à l’ouvrage sans se lasser, avec des actes simples, concrets, quotidiens ; avec l’humilité de « faire » sans toujours « dire », à l’opposé de certaines politiques partisanes. À cet égard, si Google Trends nous dit que le concept de citoyenneté s’affaiblit, œuvrons pour qu’il se concrétise toujours plus, quitte à puiser inspiration dans les témoignages que vous retrouverez dans les pages Mosaïques de la revue que vous tenez entre les mains. Bonne lecture.

Florent Nouschi, Mariste laïc

Télécharger « Regards maristes  » n°33